C’est par un succès étrange que les Clermontois ont entamé leur grande quête du Graal européen. Sans avoir joué pendant quinze jours, peut-être manquaient-ils de rythme pour être constant sur 80 minutes. Ils sont passés à côté du premier quart d’heure de chaque période avant de laisser incroyablement filer les Gallois aux bonus offensif et défensif grâce à deux essais dans les deux dernières minutes.

« C’est bien de prendre les cinq points, consent Franck Azéma, mais il y a la frustration de leur donner un point. J’espère qu’on n’aura pas à le regretter. Mais ça fait râler ces  dernières minutes », résume le technicien auvergnat.

Il y eut donc d’abord quelques petites frayeurs. Des Gallois sans complexe, qui envahissent le camp de leur hôtes bien accueillants, au point d’entendre résonner dans le stade Marcel-Michelin le « Land Of my Fathers » (l’hymne gallois) entonné par une fanfare pourtant très locale.

Mais les Ospreys sont des invités reconnaissants. Ou un peu trop orgueilleux. Ils ne prennent pas trois pénalités faciles pour finalement concrétiser cette domination d’un drop plus complexe de Dan Bigaar. À la lecture du score final, ils doivent sûrement le regretter.

Un peu plus tôt, Alexandre Lapandry a sans douté évité un essai mais pas le carton jaune. En infériorité numérique, les Auvergnats répondent du tac au tac par Camille Lopez (3-3, 18e). La machine est lancée, surtout après le retour du troisième ligne de Clermont.

La preuve? Cette phase de jeu complètement folle de 3’50, achevée par un magnifique essai de David Strettle, qui donne un tour de rein à Dan Evans, dernier défenseur effacé trop facilement par l’insatiable ailier anglais.
 
Son compatriote Nick Abendanon est lui aussi en feu. Les longues séquences maitrisées de Jaunards usent peu à peu les patiences galloises. Au terme d’une nouvelle action d’une redoutable précision, Aurélien Rougerie plonge avec bonheur dans l’en-but. Du grand art.

« On a trouvé des solutions. Quand on arrive avec de la vitesse et de la profondeur, ça passe », résume sur beIN Sport le centre clermontois à l’issue d’un premier acte en deux temps mais finalement tout à l’avantage des vice-champions d’Europe (20-3).

Dans le vestiaire de l’ASM, on doit déjà parler bonus. Mais l’ambition est encore contrariée par une entame délicate, presque catastrophique. Défense approximative, passes dans le dos, choix tactiques discutables, comme celui de ne pas renvoyer le jeu dans le camp adverse… Les Clermontois subissent et craquent.  

Les Ospreys en profitent d’abord par Tipuric puis par Eli Walker, qui exploite une incroyable bourde de Noa Nakaitaci. En deux minutes, les Gallois ont pratiquement refait leur retard (20-17, 52e) et Clermont vacille.

L’entrée en jeu de Brock James va inverser la tendance. Sa botte soulage les joueurs de Franck Azéma et réinstalle la pression sur l’adversaire. Il offre à Fofana la balle du troisième essai, dont il se prive par une grosse maladresse.

David Strettle, évident futur Homme du Match, va se charger de creuser l’écart. En solitaire, il casse de nouveau trois plaquages pour achever son slalom géant en terre promise (27-17, 68e). Il est privé d’un hat-trick par une faute de Sam Davies, qui lui vaudra un jaune. Et qui vaut aux Ospreys de laisser des espaces libres aux gloutons auvergnats.

Encore à la retombée d’une passe au pied de Brock James, Fofana a cette fois les mains sûres pour inscrire l’essai de bonus offensif . On croit l’affaire entendue. Mais c’est encore en deux minutes que les Ospreys vont chambouler les plans clermontois. Sam Parry, servi avec habileté par Tipuric, puis Thomas Habberfield refroidissent un peu l’atmosphère à la sirène.

L’essentiel est sauvé. Cela pourra suffire à satisfaire Clermont, qui empoche tout de même cinq points, comme Exeter la veille face à l’UBB. C'est simplement trois de mieux que son rival du jour. Face aux Chiefs dans trois semaines, ces passages à vides pourraient s’avérer rédhibitoires. La leçon aura sûrement été retenue.